SOUS LA MANCHE : EUROTUNNEL

21 Juillet 1987 : je suis invité avec tout un groupe de journalistes à visiter le chantier de Sangatte (Pas de Calais) qui vient de commencer - côté français -  le creusement du fameux tunnel qui doit relier l'Angleterre à l'Europe. Ce rêve fou de passer sous la mer allait se réaliser tel un roman de Jules Vernes. Je pense brusquement à l'Histoire, à Guillaume le Conquérant (XIe siècle), à l'Empereur Napoléon I, aux bateaux, aux pêcheurs, aux touristes, à la conduite à gauche, tout en vrac !

 

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Ce gigantesque chantier qui démarre marquera les relations entre l'Albion et la France d'une ère nouvelle qui deviendra sûrement une liaison habituelle.

Après plus de 5  années de creusement, d'un littoral à l'autre, la poignée de main des ouvriers franco-britaniques sous la mer signera le succès de la communication par le tunnel. Le 6 Mai 1994, sa  Majesté Elizabeth II, reine d'Angleterre, et François Mitterrand Président de la République Française inaugureront officiellement de Tunnel sous la Manche.

 

La construction de cet ouvrage d'exception a nécessité le travail de 10 000 personnes dont 4 000 sur site. On ne compte plus les emplois indirects. À l'aube du creusement, les responsables de la Société EUROTUNNEL ne tarissent pas de prévisions mirobolantes. L'avenir nous a appris que rien ne fut simple, que les déconvenues financières dépassèrent les plans d'origines et que, finalement ce tunnel eut une naissance infiniment plus difficile que prévue.

On prévoyait une affluence spectaculaire du Touristes anglais en France. Dans les années 2010, c'est un autre type de "Tourisme" qui fit polémique avec l'Angleterre : les "migrants" anglophones d'aujourd'hui qui s'accumulent à Sangatte/Calais dans l'espoir de franchir la Manche pour vivre au Royaume-Uni.

Sur le plan des transports, la création d'un tunnel sous la manche impliqua un accès routier adapté ainsi qu'un accès ferroviaire (Autoroute A26 côté français et M20 côté anglais). En plus un prolongement d'autoroute avec la Belgique et une adaptation Train à Grande Vitesse Nord (T.G.V. Nord) en France.

 

Sur le plan technique: le percement de 3 tunnels furent nécessaires par les techniques de forages les plus perfectionnées, totalisant plus de 150 km. Ce forage représente 7,5 millions de m3 de déblais. La structure des tunnels fut construite avec 2,2 millions de m3 de béton armé de 220 000 t d'acier. Les conditions géologiques furent cependant plutôt favorables, d'une roche imperméable de craie bleue. Tunneliers : 11 engins spécialement construits pour deux équipes travaillant de part et d'autre du chantier.

La galerie centrale assurera la sécurité du tunnel. Les tunnels latéraux sont à voie et à sens unique. Bien sûr, les tunneliers ont prévu des plates-formes refuges de sécurité et des zones de services tous les 375 m.

On imagine sans peine l'énormité du projet : tous les ouvriers, tous les ingénieurs, les spécialistes de toutes sortes, les intendants, les concepteurs, les géologues, les financiers, et tant d'autres intervenants...

Au final, des trains traverseront la Manche à 160 km/h dans les deux tunnels de 50 km de long. Ils seront adaptés au transport de véhicules embarqués, voitures ou camions, motos ou caravanes, ainsi que des passagers. Il fut prévu pour 30 millions de personnes et 15 millions de tonnes de marchandises. Le tout dans 30 wagons spécialement aménagés. Et on pourra relier une berge à l'autre en 35 mn!

Au-delà de la réussite technique, c'est une véritable réussite politique, historique, entre l'Europe et l'Angleterre. Ce tunnel rejoint les quelques grandes réalisations dans le monde, comme le tunnel routier du Mont Blanc et tous les autres qui sont la fierté des ingénieurs, mais aussi le canal de Panama, celui de Suez, le grand pont de Hangzhou en Chine (35 673 m sur la mer).

Ces monuments du génie humain ont tous le mérite de réunir les peuples. Souhaitons qu'ils ne servent jamais à les envahir...

Félicio Rodriguez