Svalbard

 

Photo : © Bjoertvedt

L’archipel norvégien du Svalbard, qui signifie « côtes froides » en norrois, offre ses paysages essentiellement minéraux aux amateurs d’inconnu et de sensations fortes. Dans l’océan Glacial arctique,
à près de 1 000 kilomètres du pôle Nord, il est couvert à 60 % de glaciers sculptés par le vent et le froid.

 

Sa plus grande île est le Spitzberg, aux montagnes abruptes et déchiquetées, hérissées le long de la côte ouest de pics acérés. La mer poissonneuse est très partiellement libérée de la banquise de mai à octobre. Le climat tempéré par l’océan amène des précipitations importantes à cette latitude, les températures étant moins extrêmes que dans les Alpes ou les Pyrénées. De nombreux bois de flottage venus de Sibérie jonchent les rivages. Le Spitzberg est ainsi une terre polaire très originale, un paradis ornithologique près des grandes villes septentrionales de Tromsø en Norvège et Mourmansk en Russie.


L’occupation humaine n’en fut pas moins tardive. Selon les chroniques islandaises du Moyen-Âge, les Vikings découvrirent l’archipel fortuitement en 1194, à la suite d’une tempête. Puis le Svalbard retomba rapidement dans l’oubli. Des colons russes, les Pomors, y établirent des stations de chasse peut-être dès le 15ème siècle. Avant que le Hollandais Willem Barents, parti à la recherche du passage du Nord-Est vers la Chine, ne le découvre à son tour en 1596. Aux siècles suivants, des baleiniers, chasseurs et trappeurs de nombreuses nationalités séjourneront au Spitzberg. Des expéditions polaires y établiront leurs camps de base. Au XXe siècle, la découverte de charbon amena une colonisation à l’année, avec l’ouverture en 1906 de la première mine sur le site de l’actuelle Longyearbyen.

 

Vestige pomor gravé

Musée de Barentsburg

Photo : © Bjoertvedt

 

 

 

 

 

 

 

Soleil de minuit à Longyearbyen - Photo : © Al83tito


Le soleil de minuit brille au-dessus de la capitale administrative du Svalbard du 15 avril au 26 août ; il reste alors si haut dans le ciel qu’il est parfois difficile de distinguer le jour de la nuit, d’autant que le plafond nuageux est souvent bas. La météo peut changer rapidement avec d’importantes variations locales. En juin, la neige commence à fondre au fond des vallées, vite gorgé d’eau et empli de boue. C’est le royaume de la toundra, où l’été arctique prend parfois les couleurs du grand Ouest américain. Si la température moyenne est d’environ 6°C, seule dégèle la couche supérieure de la terre. Au-dessous, le permafrost s’enfonce parfois sur une profondeur de 300 mètres. Comme le soleil brille vingt-quatre heures sur vingt-quatre, les animaux sont actifs en permanence. « La nuit » offrant la plus belle lumière, certains scientifiques et chasseurs d’images adoptent un rythme de vie de 36 heures, c’est-à-dire 24 heures d’activité suivies de 12 heures de sommeil. Le haut niveau de radiations solaires favorise la croissance des végétaux. Sur la côte ouest libre de glace en juin et juillet, les bateaux de croisière peuvent enfin pénétrer dans les fjords.

 

 

 

Svalbard, la toundra en été - Photo : © Billy Lindblom >

 

Sorti de la minuscule et rustique aérogare, c’est par une journée d’été ensoleillée que je découvre bientôt l’unique rue animée de Longyearbyen. Les maisons de bois aux couleurs vives semblent étinceler dans la lumière. Elles sont éparpillées dans la vallée par petits groupes, pour réduire les risques de catastrophes en cas d’incendie. A cause du permafrost, les canalisations d’eau sont posées à même le sol ! La bourgade compte environ 2100 habitants, de quarante nationalités. Son université et son supermarché sont les plus septentrionaux du monde. Elle abrite également le Global Seed Vault, chambre forte souterraine dans laquelle sont stockées des graines du monde entier afin de sauvegarder le patrimoine alimentaire de la planète. L’automobile y est d’une utilité relative, car aucune route ne dessert les autres lieux habités. L’hiver, quelques heures suffisent pour gagner en motoneige des coins reculés du Spitzberg, et même au-delà lorsque la banquise est suffisamment résistante. En été, le bateau est un moyen de transport privilégié, de nombreuses excursions terrestres étant toutefois possibles au départ de Longyearbyen.

 

Longyearbyen - Photo : © Peter Vermeij


Mais attention, une autorisation du gouverneur est nécessaire. Le port d’une arme à feu est obligatoire et il est recommandé d’être accompagné d’un guide ! C’est qu’environ 3 000 ours polaires sillonnent le Svalbard. Le plus grand des carnivores terrestres pèse entre 200 et 800 kg à l’âge adulte. Pouvant sentir une présence à 60 km, doté d’une pointe de vitesse de 50 km/h, il mange à peu près n’importe quoi quand il est affamé ! L’ours polaire, protégé au Svalbard depuis 1973, est malgré tout une espèce en sursis. Les plus pessimistes annoncent la disparition de la banquise d’été d’ici une quinzaine d’années, précédant de peu celle du plantigrade qui a besoin de la glace pour traquer le phoque. Les autres mammifères terrestres du Spitzberg se résument à trois espèces principales : le renne, le renard polaire et le campagnol. La morphologie des rennes s’est adaptée aux rudes conditions de vie. Ils sont courts sur pattes, ont un pelage plus épais et un corps plus trapu que leurs congénères continentaux. On trouve également de nombreuses espèces d’oiseaux comme le mergule nain, la perdrix des neiges, la mouette tridactyle, le goéland bourgmestre, le grand labbe, le pétrel, le guillemot de Brünnich et la sterne arctique. Presque toutes sont migratrices et ne nichent au Spitzberg qu’aux beaux jours. Le cas de la sterne arctique est particulièrement intéressant puisqu’elle migre entre le Spitzberg et l’Antarctique, nichant dans les deux endroits ! Au mois de juillet, certaines murailles rocheuses se couvrent de nids. Au Svalbard où le minéral domine, l’air est pur et comme dépourvu d’odeur, c’est avec surprise que l’on fronce les narines en approchant des falaises à oiseaux ! Leurs déjections fertilisent le sol pour les végétaux, qui ne peuvent survivre en été que sur 6 % des terres. On compte néanmoins 165 espèces de fleurs au Spitzberg, telle la saxifrage blanche et l’anémone pelucheuse. La vie étant fragile, toute forme de cueillette est interdite sur l’archipel, dont les deux tiers sont aujourd’hui protégés. L’accès aux parcs et réserves est strictement réglementé et surveillé par des gardes. L’environnement du Spitzberg ne fut pas toujours aussi rigoureux, comme le prouve ses gisements de charbon qui datent du début de l’ère tertiaire.  Ces vestiges d’arbres fossilisés prouvent l’existence ici de forêts équatoriales il y a 60 millions d’années. Dérive des continents !

Mergules nains - Photo : © Michael Haferkamp

 

Sterne arctique - Photo © : Malene-Thyssen Guillemots de Brünnich - Photo : © Michael Haferkamp

 

Caverne de glace - Photo : © Mavlyudov-Boris

Adventdalen en traineau à chiens - Photo : © Bjoertvedt

De nombreux moyens de transport terrestres permettent de découvrir les environs de Longyearbyen. Les hauteurs se prêtent à la randonnée. Mes compagnons et moi-même avons bientôt une vue imprenable sur la ville, les montagnes environnantes, l’Isfjord. L’eau est omniprésente, alimentée par la fonte des glaciers. Dans un pierrier, nous découvrons un spécimen de la sous-espèce boréale du lagopède alpin, seul oiseau sédentaire du Svalbard, qui doit en cette saison accumuler d’importantes réserves de graisse pour espérer survivre au long hiver. A certains endroits, l’alternance du gel et du dégel dessine des cercles de pierre sur le sol, en déplaçant les minéraux jusqu’à une trentaine de centimètres de hauteur. Les couches sédimentaires affleurent çà et là, les moraines de glaciers offrant les plus beaux spécimens de fossiles. Une excursion au départ de Longyearbyen nous conduit à un site fossilifère très riche, dont les plus vieux spécimens sont âgés de 100 à 300 millions d’années. Nombre d’entre eux, vieux de plus de 50 millions d’années, attestent que le Spitzberg était alors couvert par des forêts aux essences semblables à celles que l’on trouve en Europe aujourd’hui. Le sous-sol du Svalbard est décidément très riche. Une excursion de quatre heures en quad, au départ d’Endalen, permet de découvrir son histoire minière. Nous roulons de puits en puits, jusqu’à la vallée dégagée et humide de l’Adventdalen autrefois remplie d’un gigantesque glacier. Au sommet d’une montagne, nous atteignons l’observatoire Kjell Henriksen qui étudie les aurores boréales. Puis nous redescendons par Bolterdalen pour visiter un ancien camp de base de trappeurs. J’échange volontiers le lendemain les roues contre des patins : il est aussi possible de faire de la motoneige en été sur les glaciers ! Notamment une excursion de quatre heures sur celui de Longyear, auquel on accède après une petite marche sur un terrain rocailleux. Il faut ensuite quatre kilomètres de pilotage pour atteindre un col à 600 mètres au-dessus du niveau de la mer. Nous avons alors une vue magnifique sur Longyearbyen au Nord et la vallée de Fardalen au Sud. Celle-ci, entourée de montagnes enneigées, est connue pour être en hiver le terrain de jeu des pilotes locaux. Au retour, nous avons la chance de trouver de beaux fossiles dans les moraines. Pour les amoureux de la traction animale, l’été est aussi la saison de l’équitation et du traineau à chiens sur roues !

 

La mer est incontournable pour pousser plus loin ma découverte du Svalbard. Au départ de Longyearbyen, de nombreuses excursions d’une journée sont organisées. En kayak, je me mets discrètement au même niveau que les oiseaux pour rejoindre la rive opposée du fjord. Même les macareux moines semblent me tolérer. Le kayakiste plus aventureux, prêt à quelques nuits sous tente, se retrouve étonnamment familier des phoques barbus qui peuvent peser plus de 350 kg ! Les eaux du Spitzberg abritent également des baleines bleues et blanches, morses, marsouins et narvals. A mesure que l’on s’approche du front glaciaire, la densité des icebergs augmente. La glace craque, des blocs de milliers de tonnes se détachent des glaciers avec fracas, vêlage provoquant parfois des mini-tsunamis. Le bateau donne accès à des curiosités historiques, notamment des enclaves russes hors du temps : Barentsburg et Pyramiden.

 

 

Longyearbyen - Photo : © Michael Haferkamp

 

Barentsburg - Photo : © Martin Pyramiden - Photo : © Arcimboldo

 

Le Traité de Paris plaça en 1920 le Spitzberg sous souveraineté norvégienne, mais en accordant des droits égaux sur son activité économique à « tous les pays contractants  », quarante en tout, dont les Etats-Unis et l’URSS. Les Soviétiques se réservèrent alors trois enclaves pour l’exploitation du charbon. Seule celle de Barentsburg, à environ 40 km au sud-ouest de Longyearbyen, est toujours en activité. En été, la petite communauté russe et ukrainienne est à quelques heures de bateau de Longyearbyen, ou cinq jours de marche ! Dans un environnement rappelant la défunte Union Soviétique, les 400 résidents vivent en quasi autarcie. Quelques vaches, cochons et plantations sous serre leur fournissent des produits frais. La ville fantôme de Pyramiden fut abandonnée par les Russes en 1998. Son nom vient de la forme de la montagne la surplombant. Les bâtiments abandonnés sont squattés par les oiseaux, ce qui n’est pas le cas de celui construit en bouteilles de verre. La ville étant quasi vide d’hommes mais pas forcément d’ours polaires, il est interdit de s’y promener sans guide ! Une journée suffit également pour visiter l’ex cité minière de Ny-Ålesund. Quittant l’Isfjord, notre bateau longe la côte ouest vers le Nord.

 

Pyramiden - Photo : © Zitronenpresse

 

Nous faisons un bref arrêt pour mieux observer la très placide colonie de morses de Poolepynten, sur l’île de Prins Karls Forland. Avec leurs défenses comme des sabres et un poids pouvant atteindre 1,2 tonne, ce sont les seuls animaux craints de l’ours polaire.

 

Morses de Poolepynten - Photo : © Gary-Bembridge

 

Ny-Ålesund - Photo : © Harvey Barrison

 

Dans le Kongsfjord, Ny-Ålesund est la station la plus septentrionale du monde (78°55), aujourd’hui consacrée à la science (photo à gauche, © Jens Kube). On y recense une population d’environ 30 chercheurs l’hiver, 150 l’été, une dizaine de pays étant représentés. La base française du CNRS étudie notamment le réchauffement climatique. Au loin, les sommets du Tre Kroner (Trois Couronnes - photo de droite) culminent à 1 225 mètres. Ny-Ålesund servit de camp de base à plusieurs expéditions polaires. On peut encore y voir le mât d’amarrage d’où partirent, en 1926, le dirigeable de l’explorateur Roald Amundsen et, deux ans plus tard, celui d’Umberto Nobile. Les sternes arctiques y sont particulièrement agressives en période de nidification. Avec les bernaches nonettes, eiders et hareldes, elles revendiquent une portion du territoire urbain, car la présence humaine protège leurs œufs et oisillons des renards polaires ! A défaut de se servir dans les nids, il est possible sur un autre bateau de pêcher en mer son déjeuner, cuisiné par le cuistot du bord. La gastronomie locale fait la part belle à la viande de renne, au saumon, au hareng, à la truite et aux fromages arctiques. Une excursion de trois jours permet de contempler le glacier de la Madeleine ou séjourner à l’Isfjord radio, station située à Kapp Linné, à l’extrémité de l’Isfjorden. Construite en 1933 pour relayer les émissions et réceptions radios de l’archipel, elle héberge aussi très confortablement les touristes dans des paysages grandioses.


Terre à la beauté abrupte et mystérieuse quiétude, le Spitzberg est une destination à la hauteur de sa légende glacée.

 

Nous remercions Mr ZANDER, gérant de l'Agence Nord Espaces, pour sa précieuse collaboration.

 

SVALBARD : RESERVE MONDIALE DE SEMENCES

Qui pourrait imaginer que dans ces régions du Grand Nord, glaciales, souvent isolées, se trouve la "chambre forte mondiale" des graines de cultures vivrières de la planète ? Inaugurée le 26 février 2008, cette forteresse souterraine - ancienne mine de charbon désaffectée - est censée protéger, quoi qu'il arrive sur terre, les ressources indispensables à l'espèce humaine, surtout nutritionnelles.


 

L'initiative vient des pays nordiques qui ont choisi une des îles de l'Archipel arctique de SVALBARD, en Norvège. (A 1120 km du Pôle Nord).
Le rude climat permet une meilleure conservation de cette banque génétique de plus de 10 000 échantillons dont 2000 cultivars logée à 120 m de profondeur sur 256 m2 de surface. Le volume de stockage avoisine les 1500 m3. Les graines sont conservées à -30° Celsius. L'installation est ultramoderne, ultra protégée dans cette zone peu sismique et loin de tout grand danger. On remarquera la conception très architecturée de l'entrée du bâtiment.

A noter que même le réchauffement climatique, donc la fonte des glaces scandinaves, n'atteindra pas le site qui est situé à 130 m au-dessus du niveau de la mer. Ainsi conservées, les semences pourront "survivre", pense-t-on, probablement un millier d'années... La capacité de cette banque est estimée à plus de 4,5 millions de graines.


Cet Etablissement est financé par les Gouvernements de Norvège, de Suède, de Finlande mais aussi de la Fondation Bill et Melinda Gates, la Fondation Rockfeller, et d'autres Gouvernements comme le Brésil, la Colombie, l'Ethiopie, l'Italie, USA, et Angleterre, etc... Peut-être un jour la France.
L'apport de graines se fait par les pays du monde, surtout ceux qui risquent la famine, les destructions liées aux catastrophes naturelles ou humaines. Le conflit en Syrie a détruit la banque de gènes agricoles qui siégeait à Alep...
Il faut savoir qu'il existe plus de 1400 lieux dans le monde où des réserves de semences existent, mais ces lieux sont tous en zones dangereuses ou instables politiquement.
SVALBARD est actuellement une des plus utiles initiatives de protection de la Biodiversité et sûrement une des plus sécurisées.

 

Sources : multiples dont Wikipédia.

 

À voir, à lire sur Internet : 

https://www.youtube.com/watch?v=bdFoCQvFz5ohttps://www.youtube.com/watch?v=bdFoCQvFz5ohttps://www.youtube.com/watch?v=bdFoCQvFz5o
https://www.youtube.com/watch?v=m_DnkseAwVo
http://www.svalbard.fr/introduction-Svalbard-Spitzberg.php

 

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